Voici le support du talk donné à l’API Hour #40 de Clermont’ech le 2019-01-15.
Attention, c’est un piège ! Ou comment les réseaux sociaux abusent de notre cerveau
Petite intro sur notre cerveau
1. Les alertes ou notifications
2. Les gratifications.
3. Des contenus sans fin
4. L’acceptance sociale
5. La peur de louper un truc important
Conclusion
Que penser de la notation des citoyens ?
Petite note rapide avec quelques liens sur le sujet de la notation des citoyens.
Serons-nous bientôt tous notés ? Le sommes-nous déjà ? Est-ce un progrès ou une menace ?
La Chine vient de l’annoncer : elle commence des tests grandeur nature pour noter ses habitants. Ils ont déjà un système de notation, qui va se généraliser. Les conséquences d’une mauvaise note peuvent être importantes : accès à l’éducation, aux transports, aux emplois, etc. Il y a tellement d’articles à ce sujet que je vous laisse chercher dans vos sources habituelles. Ça a commencé en 2014, pour une mise en place prévue en 2020. Avec un tel système, on est bien au delà de Big Brother de 1984.
Vous avez du mal à vous rendre compte des conséquences d’un tel système de notation, notamment sur la vie de tous les jours ? Regardez l’épisode 1 de la 3ème saison de la série Black Mirror (puis profitez-en pour regarder tous les épisodes, l’ordre n’a pas d’importance).
Vous préférez quelques exemples à regarder en ligne ? Voyez le site Social Cooling, qui compare cette tendance de notation des personnes au dérèglement climatique.
Si nous voulons garder le moindre espoir de spontanéité dans nos vie, il est primordial de refuser ce genre de système. Les dérives sont graves et réelles.
L’anonymat doit être un droit du citoyen
Nous vivons dans un monde de plus en plus « connecté », « numérique », « digital », « 2.0 »… peu importe le vocabulaire, le fait est que les technologies issues de l’informatique et d’internet sont de plus en plus présentes. Les avantages sont nombreux, mais accompagnés d’inconvénients majeurs : la rétention des données et la perte de l’anonymat.
D’abord, une parenthèse : si on parle de « version 2.0 », c’est qu’il y a une version 1. Et même une version 0 pour certains. Exemple avec le courrier :
- la version 0 est le courrier classique : en papier, avec timbre, boite aux lettres, facteur, etc. Aucune connexion internet ni outil informatique n’est nécessaire.
- La version 1.0 est l’email classique, qu’on utilise avec Mozilla Thunderbird ou ms-outlook (les messages sont stockés sur votre ordinateur). Vous devez avoir une connexion internet pendant l’envoi et la réception de vos messages, mais c’est tout. Entre temps vous pouvez être déconnecté du réseau tout en continuant à lire ou écrire vos messages.
- La version 2.0 c’est Gmail de Google ou Live de Microsoft. Les messages restent dans le cloud, et sont consultables de n’importe où (domicile, boulot, déplacement), sur tous supports (PC, smartphone, etc.). Il faut en permanence être connecté à internet.
Il y a une progression pratique indéniable, qu’on peut apprécier, regretter ou simplement accepter. Mais elle n’est pas sans conséquence, il faut en avoir conscience pour prendre une décision éclairée. Et c’est pareil pour beaucoup d’autres services : Uber, AirBnB, etc.
Le 1er inconvénient des services comme Uber, c’est qu’ils ne sont pas anonymes, contrairement à un taxi payé en liquide, en cash. Précisons un peu :
- Quand vous prenez un taxi en le hélant dans la rue, le chauffeur ne sait pas qui vous êtes, il ne connait pas votre numéro de téléphone ni votre adresse. Si vous le payez en liquide (à l’opposé d’un chèque ou d’une carte bancaire), les seules choses qu’il connait de vous sont : votre visage et votre trajet (adresses et heures de départ et d’arrivée).
- Par contre, quand vous utilisez Uber, cette société a beaucoup plus d’informations vous concernant : toutes celles que vous avez saisies dans votre profil utilisateur : nom, prénom, adresse email, téléphone, moyen de paiement, etc. mais aussi l’historique complet et détaillé de vos déplacements.
Non seulement ces sociétés possèdent énormément d’informations vous concernant, mais en plus elles ne communiquent quasiment pas sur la rétention et l’usage qu’elles en font. Quand elles le font, vous n’avez généralement pas le choix que d’accepter la totalité des conditions, ou de ne pas utiliser du tout leur service. Leur politique de rétention des données est souvent floue, rarement comprise par les utilisateurs.
Des lois existent en France pour réguler la collecte et le traitement des informations personnelles, et la CNIL est là pour protéger les citoyens. Mais nous n’avons aucune garantie qu’une entreprise, qu’elle soit française, étatsunienne ou chinoise, supprime bien nos informations à notre demande. Le mieux est donc de ne pas les collecter dès le départ.
J’estime qu’il faut rendre obligatoire une situation intermédiaire, où c’est l’utilisateur qui décide des informations qu’il veut bien communiquer, et de l’usage qui peut en être fait. Cela peut éventuellement mener à des tarifs différents, mais au moins cela mettra bien en évidence la valeur de nos informations personnelles. Tous les services dits « numériques », « 2.0 », « apps », etc. doivent proposer un mode d’utilisation anonyme.
Une telle demande relève-t-elle de la paranoïa ? Car après tout, si nous ne faisons rien de mal, nous n’avons rien à cacher, pas vrai ? Rien n’est plus faux, nous avons tous quelque chose à cacher. Je ne vais pas développer ce sujet ici, voyez plutôt ce site web : http://jenairienacacher.fr/. Vous y trouverez articles, ressources et vidéos expliquant pourquoi il est primordial de protéger votre vie privée.
D’autre part, même si vous avez confiance dans l’entreprise en question, il est tout à fait possible que des entités externes (NSA, DGSI) aient accès aux données, où qu’une fuite arrive pour diverses raisons (erreur, malveillance, vol, incompétence, etc.).
Les entreprises « numériques » sont des ogres d’informations, contre lesquelles l’utilisateur a bien peu de poids. Il est temps de légiférer et de les forcer à proposer un mode 100% anonyme et ne laissant strictement aucune trace pour utiliser leurs services (quitte à payer plus cher).
L’importance des standards pour vous, moi… et la planète
Les standards ont un impact direct sur notre vie quotidienne, mais aussi sur notre qualité de vie globale, notre portefeuille, notre environnement, notre petite planète.
Les standards permettent d’éliminer ces petits trucs pénibles, qui nous embêtent au quotidien.
Un standard ? C’est quoi ?
Je ne parle pas du standard téléphonique, mais des normes et des standards industriels. Ce n’est pas du tout sexy, ok, mais pourtant ça nous concerne tous dans notre vie quotidienne, ça touche à notre porte-monnaie, à l’économie et l’écologie.
Exemple : le chargeur de smartphones, tablettes, etc.
Prenons de suite un exemple concret, que vous sachiez si cet article a une chance de vous intéresser : le chargeur de nos appareils mobiles (téléphones, smartphones, tablettes, etc.). Vous rappelez-vous du temps où chaque fabricant de téléphone mobile avait un modèle de chargeur ? Et parfois plusieurs modèles pour un même fabricant ? C’était galère pour trouver un chargeur compatible quand on avait oublié le sien.
Souvenez-vous :
– Dis, t’aurais pas un chargeur Nokia ?
– Ah non, j’ai un Motorola.
(Oui, ces marques de téléphone mobile ont vraiment existé 🙂 )
Puis est arrivé le format micro USB, et ça nous a simplifié la vie. On commence même à se demander pourquoi, quand on achète un nouveau smartphone ou une tablette, il y a un chargeur avec : qui n’en a pas déjà plusieurs chez lui ? On peut même utiliser un simple câble USB branché à son ordinateur pour recharger son smartphone.
Convaincu ? C’est quand même plus simple, et c’est grâce à un standard.
Certains domaines sont déjà plutôt bien standardisés, exemples en vrac : les piles dont les modèles sont assez peu nombreux (AA, AAA, etc.), les carburants (au nombre de 3 ou 4), les feuilles en papier (format A4), les capsules des petites bouteilles en verre, etc.
Autres exemples
Rapidement, quelques exemples que vous croisez tous les jours : voici 4 photos prises dans un super-marché qui font immédiatement penser « mais quel bazar ! », puis si on réfléchit un peu au pourquoi on ne trouve qu’une raison : nous faire payer plus.
Piles :Il y a quelques piles standardisées, notamment les très courantes AA et AAA, mais regardez le nombre de piles boutons différentes qui sont disponibles, c’est impressionnant.
Cartouches d’encre pour imprimantes :Connaissez-vous le prix au litre de l’encre pour imprimantes ? Est-ce que ça vaut plus ou moins que du Champagne ?
Balais d’essuie-glaces :(désolé pour la piètre qualité des photos)
Quelles conséquences en l’absence de standard ?
Une absence de standard ne va pas simplement vous gêner ponctuellement. Les conséquences sont multiples :
- Plus cher à l’achat
- Gaspillage de ressources naturelles
- Plus cher en réparation ou remplacement
- Frais plus importants en fin de vie (recyclage)
- Enfermement dans un format, ou coût de migration élevé (j’y reviens ci-dessous)
Le seul côté positif est pour la société qui fabrique le produit non standard : ses profits sont plus élevés.
Reprenons ces points un à un :
L’absence de standard vous coûte plus cher à l’achat
La conception coûte cher : c’est du temps d’étude, de recherche, de tests, etc. Quand quelque chose est standardisé, ses spécifications (la « recette » et ses caractéristiques pour le fabriquer, en quelque sorte) sont publiées. Les autres industriels peuvent alors fabriquer les produits conformes à ce standard, sans avoir à supporter tous les coûts de conception. Le produit final est donc moins cher.
Quand un standard est vraiment répandu, on peut même se passer de l’acheter. Exemple : si vous achetez une imprimante, il est fort probable qu’elle ne sera pas fournie avec le câble pour la raccorder à votre ordinateur… car ces câbles sont standards et nombreuses sont les personnes qui en ont déjà un d’une ancienne imprimante, tout à fait réutilisable.
Les standards consomment moins de ressources naturelles
Si on peut réutiliser des objets standards, logiquement on va moins en fabriquer, et donc on va moins consommer nos ressources naturelles (minerais, métaux, pétrole, etc.). Espérons que bientôt, avec un nouveau smartphone ou une nouvelle tablette, le chargeur sera optionnel : il n’est pas rare, actuellement, qu’il représente presque la moitié du contenu de la boite.
Les standards sont plus faciles à réparer ou remplacer
Nous ne réparons pas assez de choses, bien souvent nous préférons jeter puis racheter. Mais pour réparer, il faut des connaissances techniques du produit, et parfois des outils spécifiques. Si un technicien est formé et outillé pour réparer un standard, il pourra le faire pour beaucoup de fabricants, contrairement à un format propriétaire peu courant.
Si le produit n’est pas réparable, le remplacer sera plus facile s’il est standard car plus courant, moins cher, plus facile d’accès.
Le non-standard coûte plus cher après usage
Les consommateurs « lambda » que nous sommes n’en ont pas toujours conscience, mais les déchets coûtent cher : il faut trier les ordures, les ramasser, les re-trier, les traiter, etc. Un produit standard aura beaucoup plus de chances d’être tout simplement réutilisé (par vous ou quelqu’un d’autre). Le déchet qui coûte le moins cher est celui qui n’en est pas un, car il est encore utilisé.
Sans standard, vous êtes dépendant
Grâce aux standards, plusieurs fournisseurs peuvent vous alimenter. Vous pouvez donc faire jouer la concurrence. Vous n’êtes pas prisonnier d’un seul fournisseur, vous aurez donc de meilleurs prix et de meilleurs délais de livraison.
Si vous êtes habitué à vous fournir chez l’un, vous pourrez facilement passer chez un autre pourvu qu’il respecte le standard. Au contraire, si vous n’utilisez qu’un format propriétaire, vous devrez changer beaucoup d’équipement pour passer à un autre fournisseur.
Quelques propositions concrètes
La téléphonie mobile s’est démocratisée à la fin des années 90, mais ce n’est qu’en 2010 qu’il a été décidé de standardiser les chargeurs de téléphones mobiles (et encore, c’était un accord exigé par l’Europe aux principaux constructeurs). Maintenant que c’est fait, ça nous semble naturel : c’était la chose logique à faire. Cet accessoire n’apporte aucun avantage concurrentiel aux fabricants de téléphones et gêne les utilisateurs. Voici quelques exemples d’autres objets que nous pourrions standardiser pour plus de confort, moins de gaspillage, moins de tracas. N’hésitez pas à proposez les vôtres dans les commentaires.
Télécommandes (de téléviseur, décodeur, lecteur DVD/Bluray, etc.)
La grande majorité des fonctions d’une télécommande pourraient être compatibles d’une marque d’appareil à l’autre, et entre modèles : pavé numérique, changement de chaine, ajustement du volume, accès au menu et navigation, etc. Les quelques fonctions nouvelles ou spécifiques seraient simplement ignorées ou non disponibles : un appareil comme un téléviseur, un décodeur, un lecteur Blu-ray, une box internet/télévision, etc. serait quand même globalement utilisable avec une autre télécommande. En cas de perte ou de casse de la télécommande, on pourrait en utiliser une autre au moins temporairement le temps d’en avoir une qui soit 100% compatible. Et en cas de mise au rebut de l’appareil, on pourrait garder la télécommande pour un éventuel dépannage.
(photo Wikimedia)
Chargeurs de PC portable
En 2015 les chargeurs des ordinateurs portables sont encore différents entre marques et modèles, comme l’étaient les chargeurs de téléphones mobiles avant la standardisation évoquée ci-dessus. C’est aberrant car les PC portables existent depuis plus longtemps que les téléphones mobiles, et leurs chargeurs sont bien plus gros, bien plus consommateurs de matières premières.
Formats de données
Ce sujet mériterait un article à part entière, je l’évoque brièvement ici : les données que nous utilisons tous les jours sont en manque de standardisation : agenda, messagerie, fichiers bureautiques, etc. Cela veut dire que si vous utilisez un logiciel et que vous voulez passer à un autre, il peut être difficile, laborieux voire impossible de conserver vos données.
edit : comme indiqué par Stéphane dans les commentaires, il existe des standards pour ces types de données. La question est de savoir si votre logiciel les implémente, c’est à dire s’il s’y conforme. Il doit le faire un minimum pour pouvoir communiquer avec les autres logiciels similaires (exemple : ms-outlook avec Mozilla Thunderbird avec Gmail, etc.). Dans ce cas, la question du format se pose surtout pour les archives, ou l’export dans un format standard. N’hésitez pas à compléter ce point dans les commentaires 🙂
La solution
Que faire ? C’est simple : standardiser ! Et bien sûr obliger les entreprises à utiliser les standards.
Il existe déjà des groupes dont le but est de standardiser, ce sont les organismes de normalisation comme l’AFNOR en France.
Et à notre niveau, en tant que citoyen / consommateur ?
Quand on achète un produit, il faut privilégier ceux qui utilisent des standards. Exemple si vous achetez un appareil photo numérique : préférez ceux qui stockent les photos sur des cartes SD et pas sur des formats propriétaires comme le memory stick de Sony. Si vous achetez un appareil fonctionnant sur piles, refusez les formats exotiques, exigez du standard.
Les standards sont bons pour nous, notre portefeuille et notre planète.
edit : article mis à jour le 19 mai 2015, avec un ajout sur les formats informatiques et des photos de produits peu ou pas standardisés (piles, sacs aspirateurs, cartouche d’encre pour imprimantes, balais d’essuie-glace)